Moucham – OVYAE

Le rap a toujours consacré des sons, voir des disques, à l’été. Que tu sois au bord d’une plage, en train de rider le monde ou « coincé » en ville entre orages et canicules, il y a priori toujours un disque pour toi. Le rap ricain a, comme pour tout, ouvert la voie au reste du monde mais la France n’est plus en manque de projets depuis (là, comme ça, on pense bien sûr à Aelpéacha ou A2H). Moucham, rappeur de Lyon dont on vous a déjà parlé plusieurs fois, l’a aussi compris. Abreuver ses fans de sons estampillés « summer » au 1er août semble en effet une bonne idée. Continuant, après le très bon « 777 », sur un format d’EP court et bien ciselé, il vient de nous sortir l’estival « OVYAE » (pour On Va Y Aller Ensemble) il y a quelques jours.

« C’est pas à la piscine que je piquais des têtes » – 4h20

Pour tous ceux qui ne connaîtraient pas encore Moucham, OVYAE reste une très bonne porte d’entrée sur son univers. Sur ce disque, il est toujours servi par son fidèle producteur, le décidemment très talentueux Gee Saauce. Chose positive, celui-ci n’est pas tombé dans la zumba au Caprisun, tentation qui aurait pu être grande pour un tel projet. Mais que ce soit sur « Querida » ou le titre éponyme, quand les instrumentaux s’ouvrent à des rythmiques plus dansantes, il évite les pièges pour servir des productions racées. Il y plane toujours une atmosphère enfumée, parfois mélancolique, une espèce de clair-obscur qui s’accorde bien avec les lyrics toujours nuancés de Moucham. Les boucles de « Dans les nuages » ou « Confession » sont à ce niveau impeccables.

L’exercice de l’EP estival entraîne forcément son lot de thématiques et c’est donc logiquement que le triptyque ride-weed-love est bien présent. L’EP s’ouvre d’ailleurs sur « 4h20 » pour finir sur « Querida ». Logique. Mais il se permet tout de même des écarts, comme sur le très réussi « Confession ». Et surtout par touches, tout au long de l’EP. Aux détours d’une écriture souvent fouillée, on entrouvre des portes sur des nuages qui ne sont jamais loin, qu’ils soient derrière ou devant.

« Ton absence m’aura marqué au fer rouge. Toute une enfance à parler aux liens que je trouve. Râler du mec trouble devant le miroir, jamais du mektoub. » – Confession

En une écoute distraite d’ « OVYAE », de loin, Moucham et Gee pourront vous sembler reprendre simplement une bonne partie des codes du rap mainstream de 2019. Ce serait, à notre avis, gommer les aspérités du duo, leur ôter tout intérêt et certains mérites. Du rap de 2019 oui, mais sans posture mensongère, sans raccourcis musicaux faciles. Avec un autotune maîtrisé et des flows tranchants quand il le faut. Avec des couches à délayer, à découvrir au fur et à mesure, que ce soit dans les textes ou les instrumentaux. Un peu de curiosité et d’attention, c’est à ce prix-là que vous accèderez au miel de Moucham.

BONUS : l’équipe a bravé la canicule pour trouver des gens à qui faire écouter l’EP en ville. Le résultat ici.