Supergombo – Les Gardiens de l’Afrogalaxie
Il y a des retours qui font plus plaisir que d’autres. Par exemple, en découvrant que Patrick Fiori a sorti un nouvel album vendredi dernier, je peux dire que ça ne m’a pas particulièrement mis en joie. Je n’ai pas passé une mauvaise journée à cause de ça, loin s’en faut, mais disons que ça m’en a touché une sans faire bouger l’autre. En revanche, un nouveau disque de Supergombo, alors ça oui, ça fait plaisir ! Et je peux vous dire qu’en l’écoutant, j’ai les deux qui bougent, mais alors dans tous les sens. Je parle des jambes bien entendu.
Pour ceux qui ne le sauraient pas, Supergombo est un groupe d’afrofunk basé à Lyon. Après un premier EP éponyme en 2015 et le très bon LP « Explorations » paru en 2017 (illustré par le génial Goddog!), le crew revient donc cet automne avec « Sigi Tolo » chez Z-Production. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ceux qui se situent eux-mêmes (et on aurait du mal à les contredire) a mi-chemin entre l’Orchestre Poly-Ritmo de Cotonou et les Head Hunters, ont réussi leur coup à 300% et viennent sûrement de sortir leur meilleur disque.
Sigi Tolo est le nom donné par le peuple Dogon du Mali à l’astre Sirius B. Les connaissances des Dogons sur ce satellite invisible à l’oeil nu sont immenses et anciennes. L’histoire raconte que des extra-terrestres leur auraient rendu visite et transmis cette érudition. Plus que de savoir si cette légende est vraie, ce qui a interrogé (et dérangé) Supergombo, c’est la version communément admise qui veut que ce savoir ait été transmis par des scientifiques français. Et donc le fait qu’il soit inconcevable pour des occidentaux que d’autres cultures, notamment africaines, possèdent des connaissances avant eux. Sans s’emparer de la dimension politique de l’afro-futurisme, l’idée derrière ce disque est de créer une Afrique spatiale en incorporant le retro-futurisme dans leur son mélangeant déjà rythmes traditionnels africains (notamment) et funk.
On ne va pas se mentir, ça marche à fond ! La rencontre du son organique et des synthétiseurs analogiques mâtine les compositions d’une touche sci-fi rétro du meilleur goût. Supergombo a toujours voulu avoir un son personnel et, bien aidé encore une fois par Vincent Taurelle à l’enregistrement et au mix (il a bossé notamment sur des disques d’Oumou Sangare, Tony Allen… mais aussi Oxmo Puccino ou Bumcello), la mission est réussie. Que ce soit sur des rythmes endiablés ou des sons plus planants, on est immergé dans ce voyage spatio-temporel, emporté dans les couches d’échos et d’effets sonores.
Pour parler de quelques morceaux en particulier, tout commence avec le fantastique « Alien Felines from Beyond the Galaxy » dont le clip réalisé par Ugo Wuul et Peter the moon (l’auteur de la sublime cover du disque) nous offre un combat épique entre félins envahisseurs et poissons résistants. On a adoré « Ekows » (en hommage aux Ewoks) avec son synthé très R2D2 et l’aérien « Le Rêve de Kovacks », inspiré d’une rencontre à Goa. Notre gros coup de cœur va au survitaminé « Vortex », sa folle transe percussive nous emportant dans une course-poursuite à bord de vaisseaux spatiaux digne de Cowboy Bebop.
Vous l’aurez compris, cet album est une preuve de plus que Lyon regorge de musiciens talentueux bourrés d’idées. Si ce disque résonne aussi en vous, on ne saurait que trop vous conseiller d’aller faire un tour sur le bandcamp du groupe pour choper du digital, cd ou vinyle. Encore mieux, en ces temps de disette scénique, on aura peut-être la chance de les voir le 21 novembre du côté du Jack Jack de Bron. D’ici là, on croise les doigts en secouant notre bassin la tête levée vers les étoiles. Bah oui, on sait jamais, d’ici que des chats extraterrestres nous attaquent la gueule…
PS : si vous voulez creuser un peu plus l’univers de Supergombo, n’hésitez pas à aller écouter la très cool interview d’Etienne Kermarc (bassiste du groupe) chez Nova.